STRATÉGIE : UNE DÉCISION APPAREMMENT LOGIQUE PEUT FAIRE DE GROS DÉGÂTS !

Fumer n'est pas bon pour la santé. Donc, pour décourager les gens de fumer, on fait des campagnes de prévention (dont l'impact est quasiment nul sur la consommation de tabac).

Comme ces campagnes de prévention ne suffisent pas, il fut décidé d'augmenter fortement et régulièrement le prix des cigarettes pour décourager les fumeurs (on aurait aussi pu interdire la vente de tabac si le tabac est si dangereux que cela mais l'Etat n'aurait alors plus encaissé de juteuses taxes et les buralistes auraient fait faillite).

Non seulement le nombre de fumeurs ne diminue pas tant que cela mais, au-dela` d'un certain seuil de prix, on obtient des effets indésirables :

On devrait pourtant se féliciter que les ventes de tabac baissent, cela signifiant qu'il y a moins de fumeurs (bien que l'Etat encaisse moins de taxes, ce qui démontre aussi que la santé n'est pas la seule variable a` entrer en ligne de compte dans les augmentations du prix des cigarettes).

Sauf que, si les ventes baissent, ce n'est pas parce qu'il y a moins de fumeurs mais parce qu'il y a moins d'achats dans les bureaux de tabac.

Car non seulement les fortes augmentations de prix n'ont pas entraîné de fortes baisses de la consommation de tabac mais, pire, elles ont créé une nouvelle forme de délinquance (qui n'existe pas dans les pays européens ou` le prix des cigarettes est en-dessous de 5 euros le paquet) : la contrebande de cigarettes.

Cette contrebande de cigarettes engendre une multitude d'effets indésirables :

- baisse des ventes pour les buralistes.

- dépenses de l'Etat pour lutter contre la contrebande (en moyens humains et matériels), dépenses qui n'auraient pas existé si l'on n'avait pas créé de toutes pièces cette contrebande en augmentant les prix du tabac dans des proportions exagérées.

- baisse des recettes des taxes sur les cigarettes pour l'Etat.

- cigarettes de contrefaçon qui circulent de plus en plus en France.

Ce qui s'est passé avec les cigarettes est exactement ce qu'il se passe avec les impôts : lorsque les taxes ou les prélèvements sont trop importants, les gens fraudent.

Il faut donc toujours soigneusement étudier le "point de bascule", le point ou` les avantages se transforment en inconvénients, ce qui n'a visiblement pas été fait avec le prix des cigarettes en France.

Cette décision, apparemment logique, de vouloir augmenter le prix des cigarettes pour décourager les fumeurs a abouti a` une énantiodromie (transformation d'une chose en son contraire), concept bien connu pourtant des économistes et en théorie de la communication.

Et une fois que le point de bascule a été franchi, tout s'accélère dans le mauvais sens en un cercle vicieux : toujours plus de contrebande nécessitant toujours plus de répression, toujours moins de ventes pour les buralistes nécessitant toujours plus d'aides a` ce secteur d'activité, pas moins de fumeurs ni de cancers du poumon, moins de taxes perçues par l'Etat, etc...

Et il semblerait bien que la leçon, pourtant claire et évidente, n'ait pas été apprise ni comprise : on entend encore des voix réclamant une nouvelle hausse du prix des cigarettes.

Mais dans quel but puisqu'aucun des buts poursuivis n'a été atteint en appliquant cette recette apparemment logique ?